Un écrivain, une région : Marcel Pagnol et la Provence de Marseille
La richesse de la littérature française vient assurément de la diversité régionale de ses auteurs. Partons à la découverte de la Provence, une région qui a fortement inspiré un de ses plus ardents défenseurs : Marcel Pagnol.
Tous les petits écoliers français étudient un jour ou l’autre un de ses romans. Avec Frédéric Mistral et Jean Giono, Marcel Pagnol fait partie des maîtres de la littérature provençale.
Pagnol est le premier dramaturge (auteur de théâtre) à présenter à Paris des pièces situées en province, dans sa région natale, la Provence. Une « audace folle » dans un monde très parisianiste où l’on apprécie la comédie parisienne mondaine, à la Feydeau, Labiche ou Guitry.
Né sur la route d’Aubagne, le pitchoun’ (enfant en Provence) raconte son enfance marseillaise dans une trilogie autobiographique culte qui commence avec La Gloire de mon père et se poursuit avec Le Château de ma mère et Le Temps des secrets.
Fils d’un instituteur d’Aubagne, Pagnol situe toute son œuvre dans la société provençale de l’époque, urbaine ou rurale, populaire ou bourgeoise: La Femme du Boulanger, Jean de Florette et sa suite Manon des Sources, La Fille du Puisatier ou encore la mythique trilogie Marius, Fanny et César.
« L’honneur est comme les allumettes : ça ne sert qu’une fois. » ( Marcel Pagnol)


Les Français découvrent un folklore provençal, fait de garrigue ( lande méditerranéenne) baignée de cagnard ( soleil), où des personnages archétypaux parlent français avec un accent chantant typique de la région ( « l’acseingue chann-tang deu Marr-seilleu «).
Pagnol met à l’honneur un nouveau genre littéraire unique, celui de « la littérature régionale ». Il met en scène des personnages pittoresques locaux, pleins d’humour, mais toujours de façon noble et digne. Ce sont des gens du peuple comme les autres, avec leurs vertus et leurs faiblesses. Cette profondeur psychologique confère aux histoires de Pagnol un caractère universel intemporel. Pagnol crée une forme de « mythologie provençale » qui remporte un succès immédiat.
Grâce à Pagnol, les cultures régionales, leurs villes et leurs campagnes trouvent enfin une reconnaissance publique dans le paysage culturel français, même si la langue d’expression reste le français, certes truffé de nombreuses expressions idiomatiques locales.
En effet, depuis l’école publique française au XIXème siècle, les langues régionales sont de moins en moins parlées…le français devenant la langue de la République Française. Néanmoins, chaque région a gardé son accent et ses expressions régionales.
« Telle est la vie des hommes. Quelques joies, très vite effacées par d’inoubliables chagrins. Il n’est pas nécessaire de le dire aux enfants. » ( in « Le Château de ma mère »)
Pagnol aime surtout explorer des situations universelles autour de la famille. Les intrigues évoquent des conflits de loyauté, des histoires de vengeance, de pardon, de sacrifice, d’amour impossible, mais aussi la force implacable de cette indomptable nature méditerranéenne (la mer, le climat, la garrigue). On oscille souvent entre drame et comédie chez Pagnol. Les conversations sont tantôt graves, tantôt de véritables feux d’artifice de verve provençale.
Marius raconte par exemple le dilemme d’un jeune Marseillais qui rêve de s’émanciper du destin sacrificiel que lui prévoit son père, un veuf cafetier trop protecteur, quitte à abandonner à son sort la femme qui l’aime, Fanny.
Au cinéma, l’œuvre de Pagnol continue d’inspirer des générations de réalisateurs. Pagnol a lui-même réalisé certains des films basés sur son œuvre. Les plus grands acteurs français (souvent provençaux) s’y sont distingués: Raimu, Fernandel, Pierre Fresnay, Louis Jouvet, Orane Demazis, Yves Montand, Daniel Auteuil, Emmanuelle Béart, Raphaël Personnaz, Ariane Ascaride, pour n’en citer que quelques-uns.
Il a même épousé deux des actrices de ses films : Orane Demazis dans les années 20 puis Jacqueline Pagnol en 1940, qui a incarné Manon des Sources en 1952 sous la direction de son mari. Si Marcel s’en est allé en 1974 à Paris (atteint d’un cancer), Jacqueline s’est éteinte en 2016 à 95 ans.


Pour partir sur les traces de Marcel Pagnol à Marseille
Première étape : rendez-vous sur le Vieux-Port de Marseille. C’est là sur le fameux Marché aux Poissons que se situe une partie de la trilogie de Marius, Fanny et César.
En levant les yeux, vous apercevrez la basilique Notre-Dame de la Garde, l’immense Madone d’or qui garde la Cité Phocéenne. En haut, la vue à 360 degrés sur le Vieux Port antique romain et les montagnes alentours est à couper le souffle. Pour ce faire, vous pouvez opter pour les escaliers (gare au cagnard !) ou prendre un petit train depuis le Vieux Port. Vous pourrez ensuite vous détendre autour d’une bonne bouillabaisse marseillaise.
Si vous voulez découvrir les lieux où Pagnol a grandi et situé ses œuvres plus rurales, il faudra vous rendre dans les villages de La Treille ou de la Bastide Neuve ( ces villages font désormais partie de Marseille). Au cimetière de La Treille, vous trouverez toute les tombes de tout la famille Pagnol, Marcel, son frère et ses parents.
N’hésitez pas à rayonner autour de la Cité Phocéenne. Pourquoi pas un petit pique-nique le soir sur la plage de Carry le Rouet, la station balnéaire préférée de Fernandel, ou une balade au Parc National des Calanques de Cassis) , ou encore une excursion à Aix-en-Provence, la ville de Cézanne . La région regorge de lieux pleins de charme et d’histoire où il fait bon siroter un pastis (alcool anisé local), en écoutant la mer et les cigales. Un peu au nord d’Aix-en-Provence, se trouve également Manosque, la ville de Jean Giono, l’autre grand écrivain provençal contemporain de Pagnol.
Pour préparer vos prochaines promenades sur les traces de Pagnol à Marseille.
NB- Précisons que la Provence est une vaste région qui va de la Drôme Provençale aux limites des Pré-Alpes du Vercors jusqu’à Nice et Menton. Marseille se situe au début de la Côte des Calanques qui se prolonge avec la Côte d’Azur ( à partir de Hyères). De nos jours, toute la côte méditerranéenne de Marseille à Menton est appelée « Côte d’Azur » dans le langage courant. La Provence de Marcel Pagnol se concentre essentiellement sur une zone autour de Marseille.
Article rédigé par Laurence Kam-Thong, coach et formatrice chez France Madrid (Innoveria Coaching)
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